Sébastien Loeb : « surpris et touché »

Pour la quatrième fois depuis 2009, le nonuple champion du monde des rallyes est désigné comme le sportif n° 1 dans le cœur des Français. Plus que pour sa vitesse volant en main, c’est sans nul doute pour sa constance au plus haut niveau et son caractère discret et humble que les Français l’ont de nouveau choisi. Entretien.

Sébastien, vous arrivez en tête de deux sondages de l’institut Ifop. Le premier concerne la notoriété de différentes personnalités sportives ayant marqué 2012 ; le deuxième la personnalité sportive ayant le plus marqué cette même année. Qu’en pensez-vous ?

Je suis toujours surpris et touché d’avoir une telle preuve d’estime. Surpris, parce que le rallye n’est pas la discipline sportive la plus médiatique de la planète, et parce que je cours peu en France. Touché, parce que j’ai le sentiment qu’au-delà du sportif et de sa carrière, c’est l’homme qui est désigné. Donc, ce genre de distinction me va droit au cœur. Comme le soutien populaire que j’ai depuis que le rallye de France se déroule en Alsace. Là, je vois les gens qui sortent dans la rue. Ce ne sont pas forcément des passionnés de rallye mais ils savent que les voitures passent devant chez eux, alors ils sont sur le trottoir avec des banderoles pour m’encourager. Cela, ça me touche aussi.

Y a-t-il dans vos souvenirs un élan populaire qui vous a plus particulièrement marqué ?

Oui, cette année, lors du rallye d’Alsace, chez moi, à Haguenau, après l’arrivée de la dernière épreuve spéciale : il m’a fallu un quart d’heure pour faire deux cents mètres. C’était hallucinant. Il y avait la foule partout autour de la voiture et même sur la voiture ! Je crois que cet élan-là m’a encore plus marqué que les 6 000 personnes qui étaient réunies au Zénith de Strasbourg pour la remise des prix. Mais ça, c’était énorme aussi. C’était la première fois que je voyais tant de monde à une remise de prix. Au Pays de Galles, par exemple, au milieu d’un champ boueux, sous la pluie, il n’y a pas plus de vingt personnes pour le même genre de cérémonie !

Quand on voit les foules que vous faites déplacer, on a l’impression que vous êtes devenu une rock-star…

Impossible, je ne sais pas chanter ! Je reste quand même avant tout un champion de rallyes. Tant mieux si les gens apprécient ce que je fais et qui je suis. Au plus profond de moi-même, je n’ai pas changé au fil des années. Je suis resté le même, c’est-à-dire un passionné de sport automobile et de rallyes en particulier.

Vous avez décidé, d’un commun accord avec Citroën, de lever le pied en 2013 et de ne courir que quatre rallyes. Le choix des épreuves est-il maintenant arrêté ?

Oui. Au moins pour trois. Je vais courir le Monte-Carlo puis enchaîner avec la Suède. Je serai aussi au départ du rallye de France, chez moi, en Alsace, bien évidemment. Je ne me vois vraiment pas louper ce rallye. Et puis, il y aura un rallye sur terre avant. On a parlé de l’Argentine, avec Yves Matton, le directeur de Citroën-Racing. Mais cela reste à confirmer.

Votre objectif, maintenant, est de vous tourner vers les circuits pour participer au championnat du monde des voitures de tourisme (WTCC). Où en êtes-vous ?

La décision officielle de l’engagement de Citroën n’a pas encore été prise. J’espère qu’elle le sera bientôt. J’ai vraiment envie d’aller au bout de ce projet avec Citroën. Pouvoir continuer ma carrière de pilote dans une autre discipline, mais toujours avec la même marque, pour moi, c’est l’idéal. Je sais que tout avance dans le bon sens. Donc, je suis optimiste et j’y crois. Il reste à attendre que les grands décideurs se prononcent.

Et les 24 Heures du Mans ? On a l’impression que seule la victoire vous intéresse…

Oui, c’est un peu ce qui me retient de rouler pour mon team. Le Mans, c’est vraiment une course mythique, un événement super-sympa à vivre. Que ce soit en pilote, en team-manager, en spectateur. J’ai pris deux fois le départ, sur une Pescarolo, à une époque où on pouvait vraiment prétendre gagner au volant d’une voiture privée. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Pour moi, Le Mans, ce n’est pas une priorité. Mais je peux y être simplement pour le plaisir en tant que team-manager de mon écurie Sébastien-Loeb-Racing… Peut-être que plus tard, je les courrai au volant d’une voiture de mon team. Mais je dis bien peut-être. Ça ne fait pas partie de mes priorités.

Vous êtes quand même fier d’avoir failli les gagner, ces 24 Heures ?

Fier ou pas, c’est effectivement un grand souvenir. Ma deuxième place, en 2006, avec Éric Hélary et Franck Montagny, c’était fort. C’est un des podiums de ma carrière qui m’a le plus marqué.

Pour finir, parlons de Formule 1. Vraiment aucun regret de ne pas avoir pu prendre le départ d’un Grand Prix ?

Aucun regret effectivement. Je suis déjà heureux d’avoir eu l’opportunité de rouler dans des Formule 1. Les sensations que procurent ces voitures sont fantastiques. Je suis vraiment heureux d’avoir pu goûter à ce plaisir car une F1 procure des sensations incroyables. Mais je demeure réaliste : pour prendre le départ d’une course de F1, cela demande une préparation spécifique. Moi, quand je faisais des essais, je venais les mains dans les poches, je montais dans la « caisse » et je repartais. Ce n’est pas comme cela qu’on se prépare à prendre le départ d’un Grand Prix. Mais je suis fier d’avoir fait des temps au milieu des pilotes habituels…

Recueilli par Jacques HÉBERT/Ouest France